C’était en 1998, cela fait 20 ans à présent, tu avais 17 ans et demi, tu avais un mal de vivre, toi si sensible, si fragile, je ressentais que j’allais te perdre, j’étais si impuissante, je n’ai pas pu t’aider, je vis encore dans la culpabilité, Et pourtant comme je t’’aimais ! Et tu le savais bien !
Aujourd’hui, si longtemps après, je reste cette petite chose fragile aussi, pour les autres, je suis forte, je cache si bien mon chagrin, ma tristesse, je porte continuellement un masque, je survis pour ton frère qui a beaucoup grandi et auquel je m’accroche, il est la seule personne qui me reste sur terre dans cette vie, papa t’a rejoint très vite comme tu le sais épuisé par le chagrin.
Moi, je suis restée pour ton petit frère.
Aujourd’hui j’ai avancé sur ce chemin de souffrance, j’ai voyagé pour m’occuper, pour me changer les idées, j’ai voyagé pour rencontrer de nouvelles personnes, mais je suis toujours revenue au point de départ.
A chaque fois, j’emportais mon chagrin, les découvertes, les rencontres m’ont aidée un temps mais au final, ma souffrance, mon manque de toi sont toujours bien présents comme ma solitude.
Pourtant, ma solitude a été une alliée, ma chance, elle m’a permis de m’évader de mon quotidien, de quitter un temps les mauvais souvenirs et j’ai fait de belles rencontres.
Quand je vois tout ce que j’ai accompli seule, le chemin parcouru, je suis fière de moi et toi mon fils, mon Nicolas, tu m’as toujours accompagnée, tu peux être fier de ta maman !
Je t’ai toujours emporté avec moi, l’album de photos de notre famille, de quatre, nous passons à deux, ce petit frère que tu aimais tant a bien grandi tu sais, tu peux être fier de lui aussi ; nous ne parlons jamais de toi, nous sommes bloqués tous les deux, trop de souffrance mais je sais qu’il t’a dans son cœur, nous nous sommes croisés au cimetière, c’était si triste, chacun de notre côté, moi je partais, lui arrivait…
Je suis toujours en décalage avec les gens, ils m’ennuient encore, je suis si différente, eux sont dans les festivités, les rires, moi je suis avec toi, ils ne peuvent pas comprendre, ils n’ont pas vécu la perte d’un enfant, ils sont si ignorants, ils ne savent pas que tu es dans mon cœur pour l’éternité.
Je sais que je te retrouverai, j’ai fait tant de chemin pour le comprendre, je n’ai que des certitudes, je me demande souvent comment j’ai fait pour vivre tant d’années sans te voir, je t’ai imaginé, tu es constamment près de moi, à présent je suis encore plus près de toi, les années se rapprochent, je t’aime tellement.
Je suis mal avec les autres, quand je vois tes copains qui ne parlent jamais de toi, quand je les vois avec un enfant dans les bras, mes yeux s’emplissent de larmes, cet avenir que tu n’as pas eu ! Peut-être es-tu plus heureux ?
Mon Nicolas, je t’aime tellement !
Chantal de Suisse
Note : Chantal avait déjà une lettre à Nicolas. Cliquer ici pour la lire
Certes la vie est insupportable sans nos enfants. Certes, nous sommes en décalage avec les autres, ils ne peuvent savoir ce que nous endurons.
Mais gardez espoir car nous reverrons nos enfants, c'est une certitude. Ils n'auraient pas voulu que l'on soit tristes à cause d'eux, ils nous aimaient trop pour cela.
Courage à toutes, la lumière est au bout du tunnel.