Dix ans après, vite un mouchoir car les larmes me submergent, je ne vois plus rien, je m’arrête comme interdite. Je fais le décompte du temps comme le premier soir sans toi, le premier matin, le premier mois, la première année. Dix ans après, je cherche désespérément l’odeur de tes cheveux, l’esquisse de ton sourire complice, le bleu de tes grands yeux ouverts sur le monde.
Dix ans après, c’est quelquefois encore indicible et parfois impensable pour moi. L’évolution de ta maladie était prévisible mais la survenue brutale de problèmes médicaux s’enchaînant dramatiquement et dévalant en une cascade folle ont empreint chez moi un sentiment d’urgence allié à une perception parfois irrationnelle d’un danger invisible. Quand je remonte seule, en mémoire, le déroulé des évènements de ta dernière nuit, je sens encore le coup viscéral violent et j’ai toujours le même besoin physique de me recroqueviller. Dix ans après, comme aux premières minutes qui ont suivi ton départ, je suis là quelquefois comme un pantin qui bascule dans le vide, sans savoir que faire d’autre sinon de me laisser traverser par le décontenancement le plus total.
Dix ans après, j’éprouve encore un peu de colère qui fait irruption sans crier gare quand je suis trop fatiguée et j’ai toujours quelques remords bien tapis dans mes nuits blanches mais surtout une tristesse tellement immense qui fait le lit de ma vie qui continue malgré tout. Mais il y a aussi les nouveaux amis, ceux qui sont délicats, attentifs et présents, là, maintenant. Et il y a aussi mon propre cheminement dans la solitude, la densité des rencontres avec des gens qui réfléchissent, l’authenticité que je mets dans mes relations, la valeur particulière de la présence des autres dans ma vie alors que ton absence s’installe imparablement dans le temps du souvenir depuis déjà dix ans.
Valérie
Il n'y a pas de délai, pas de conseils, pas de recette, chacune trouvera ou pas le moyen de cheminer sur le sentier du deuil et de continuer sa route...
Mon Isabelle avait presque 19 ans, il ya 15 ans dejà et oui elle est toujours avec moi.
Perdre un enfant est terrible, je ne connais pas cette douleur. Perdre sa moitié, son double est invivable, je me sens amputée, mon cœur est malade, tous les jours je pleure des larmes de sang depuis deux mois. Ma Valérie ne m’a pas quittée une seconde.
Je n’arrive plus à voir les personnes qui m’entourent et qui m’aiment. A peine mon fils de 13 ans! Chaque matin et toutes les nuits je me réveille avec la pensée du réel ou de l’iréel. J’ai tenu la main à ma sœur chaque jour jusqu’à la dernière seconde, les images de ces sept mois ne me quittent pas !
Pourquoi elle, pourquoi ai-je le droit de vivre alors qu’elle n’est plus là ? Sa jolie petite fille de seulement deux ans et demi m’apaise et à la fois me déchire le cœur!
J’attends des signes, je suis à la recherche de spiritualité et j’espère un jour la retrouver... Elle me manque, je me retiens de hurler... Je suis très entourée mais à la fois très seule avec ma souffrance qui ne fait que croître.
Je suis à la recherche d’une personne comme moi, ayant perdu sa sœur jumelle. Merci.
Ma Costanza est partie à 24 ans et c'est bien des larmes de sang qui coulent dans mon quotidien. Le présent est insupportable, le futur s'est obscurci. Je ne suis plus moi-même. Seuls mon fils de 17 ans et mon mari m'obligent à me lever le matin et moi aussi je ne vois plus les personnes qui m'aiment.
Nous sommes des amputées, je vis en apnée. Chaque changement de situation me remettant dans la réalité me fait chanceler donc me réveiller le matin est un drame par exemple.
Chère Madame, vous n'êtes pas seule dans votre malheur, je fais moi aussi mon chemin de croix comme un chien errant et souffrant.
4 ans après ta publication, c'est maintenant que je la vois. J'ai perdu ma jumelle il y a 3 ans et c'est terrible. J'aimerais pouvoir partager cela avec toi si tu as touhours envie..
Je t'ai laissé mon mail
ça fait un mois que mon fils est décédé noyé dans la Seine. Il a été poussé par un copain. Je suis anéantie, j'y arrive pas, il avait 14 ans mon Kenan.
Ma maison a été bombardée. Son frère jumeau n'arrive plus à dormir et j'ai deux autres jeunes enfants de 10 et 8 ans, c'est tellement difficile.
Mon mari n'a plus de force, on vit un jour après l'autre dans la douleur.
Il nous manque tellement.
4 ans après ta publication, c'est maintenant que je la vois. J'ai perdu ma jumelle il y a 3 ans et c'est terrible. J'aimerais pouvoir partager cela avec toi si tu as touhours envie..
Je t'ai laissé mon mail
J'ai de la peine pour vous, je sais ce que vous pouvez ressentir car moi aussi j'ai perdu mon fils Gaëtan à l'âge de 21 ans le 11 février 2005; il a décidé de quitter ce monde en mettant fin à ses jours. La vie pour lui était trop difficile à vivre et j'ai beaucoup culpabilisé de ne pouvoir l'avoir aidé suffisamment.
Aujourd'hui mon cœur s'est apaisé. Avec le temps, j'ai compris qu'il fallait accepter l’inacceptable pour pouvoir continuer de vivre. J'ai eu des signes de mon fils qui m’ont beaucoup aidée. Mais il y aura toujours cette cicatrice qui ne se refermera jamais.
Comment vous faites ? Dites-moi. Je n'arrive plus à sortir, plus goût à rien. J'ai une psy mais ça ne le fera pas revenir. Son anniversaire est le 17 juillet. Je ne pourrais pas lui fêter, lui faire une surprise, l' embrasser, le toucher, le couvrir de cadeaux, lui faire son gâteau préféré.
Je voudrais avoir une grande échelle pour aller le chercher. Mon coeur est brisé pour toujours, je ne l'entends pas battre. J'ai une boule dans la gorge et j'ai perdu l'appétit.
J'ai une chance immense d'être sa maman car je le serai le restant de mes jours. Je me dis tous les jours... quel gâchis. Quelle vie... Le temps empire les choses, il ne guérit pas... ça nous transforme pour toujours et les autres ne peuvent pas le comprendre. Oui, je ne souhaite à personne de le vivre... ça te mine chaque jour et chaque nuit blanche. C'est insupportable de gérer ce vide. Ne plus toucher ton enfant, ne plus l'entendre, ne plus pouvoir l'aider et l'embrasser... Ne plus pouvoir l'accompagner dans ce monde.
Marco, je te remercie pour tes brèves présences dans mes rêves, tu rassures maman avec des beaux sourires tout doux.
Je t'aime tant, mon coco.
J'ai perdu subitement mon fils de 35 ans, il y a eu un an le 4 mai 2015, d'une rupture d'anévrisme cérébrale. Ses dernières paroles alors qu'il se trouvait en Espagne (et faisait son jogging quotidien) et hospitalisé : "j'ai mal à la tête, j'ai mal à la tête, je t'aime maman"
Ces mots je les entendrai jusqu'à la fin de ma vie, comme si il me disait adieu .. Son frère cadet qui a 28 ans était avec lui et a assisté impuissant à son départ, violent, brutal, alors qu'ils arrivaient pour une semaine de congé..
Perdre un enfant nous ampute, nous sidère, on a envie de crier, on a l'impression que notre coeur est poignardé, que notre corps se liquéfie, plus rien sous nos pieds. Et puis les démarches, rejoindre notre fils et être confrontés à la réalité, jamais plus on ne pourra le serrer dans nos bras, l'embrasser, l'écouter rire, parler, chanter, râler aussi... Des mois à se cloîtrer, sans oublier cependant que l'on a un autre enfant, qu'il faut porter notre souffrance mais aussi la sienne, car elle est extrême pour lui aussi.
Puis reprendre le travail, conseillée par une psy, aidée, écoutée, avec qui on peut laisser aller son chagrin, sans jouer un rôle dans la vie, qu'elle soit privée ou professionnelle... Une chanson, un lieu, un anniversaire, Noël, mon Dieu, Noël sans lui, et mon fils cadet qui dit : "on dit qu'il faut faire avec, le pire c'est de faire sans". Comme il a raison mon gamin, faire "sans" c'est cela, sans lui. Une autre vie à mener, un combat quotidien. Je dis toujours que lorsque j'ai mis les deux pieds au sol le matin, j'ai déjà gagné une bataille. Car ensuite, ce n'est plus la vie, celle d'avant, c'est un combat, aller chercher au plus profond de soi la force pour continuer, pour vivre avec ce handicap de la vie, lancinant, douloureux, invisible pour les autres.. Lui aussi est invisible, mais il est là, partout, tout le temps. J'ai mal à l'âme, dans cette vie de paradoxes : continuer pour ceux qui restent, partir pour le rejoindre, sourire aussi quand on a envie de pleurer, bosser quand on voudrait partir loin et s'isoler.. Je pourrai écrire des heures mon ressenti.. Mes plus sincères pensées à toutes ces personnes qui ont écrit et plus particulièrement a celles qui ont perdu leur unique enfant, il n'y a pas de mots..Continuons malgré tout..
Comment avez-vous avancé depuis ce témoignage, voilà un an?
Amitiés.
Gaëlle
Oui, ce que vous dites est vrai, juste, sincère, authentique et je ne peux que partager l'immense douleur de la situation que vous décrivez. La violence de la situation est insupportable, que cela soit pour l'aspect psychologique ou le corps qui se rappelle à vous de façon violente, douloureuse et lancinante.
Et comme vous le décrivez, le bonheur des autres (ou simplement le fait qu'ils vivent leurs vies...) devient insupportable et conduit à un sentiment d'injustice - qui s'ajoute à ce sentiment d'injustice quant aux différentes personnes qui étaient dans la voiture...
Juste deux petits commentaires :
1) ne restez pas seule par rapport à cette situation, peut-être commencer par des lectures sur les étapes du deuil (je pense au Docteur André ou Fauré qui ont admirablement écrit à ce sujet), je pense aux groupes auquel se forum appartient également.
2) ne restez pas seule et faites vous aider par un psychothérapeute que vous choisirez - confident de ce qui est insupportable à partager avec qui que ce soit mais qui vous permettra d'avancer à votre rythme sur toutes ces émotions que sont la violence, l'injustice, la culpabilité, le manque, la peur de demain, la solitude et toutes ces émotions qui vous traversent aujourd'hui.
En toute transparence, votre expérience de vie restera à jamais dans votre mémoire. Il y aura toujours avant l'accident et après - il y aura toujours une nouvelle hyper-sensibilité à tout ce qui se passe et une modification importante des priorités de vie. Le docteur ANDRE je crois parle que nous sommes tous équipés "d'un petit moteur" qui nous permet de reprendre le chemin de quelque chose - je ne sais pas encore de quoi mais c'est vous qui l'imaginerez et serez acteur de ce chemin - en lien quasi quotidien avec votre expérience de vie aussi dure soit-elle.
Toutes mes pensées vont à votre fils. Très cordialement.
Pourquoi lui ? Il me manque tellement que je ne sais pas si j'aurai la force de continuer.
Comme je ressens, je partage ce que vous exprimez. J'ai perdu mon fils de 26 ans le 22 juillet 2015, l'essence même de ma vie, ma raison d'exister... Depuis c'est le vide, le désarroi, l'envie de le rejoindre souvent. Se réveiller le matin en se disant que ce n'était qu'un cauchemar... Le travail, les collègues, ma famille, mes amis, ses amis, la nature sont là, bienveillants, attentifs, respectueux et malgré toute cette terrible souffrance, ça m'aide à avancer un peu chaque jour. Nous avons en chacun de nous des ressources insoupçonnées qui nous donnent la force de continuer sur le chemin de la vie même si ce chemin restera à jamais plein d'obstacles à franchir. Vivre sa souffrance et l'apprivoiser, laisser couler ses larmes, ses cris pour inscrire cet enfant au plus profond de soi pour l'éternité. Nos enfants nous manqueront toujours mais un jour la vie nous sera plus douce, j'espère...
La conférence intégrale sur le deuil Dr Christophe FAURE (youtube) est une aide précieuse pour cheminer dans le processus de deuil.
Ei il faut tellement de courage pour supporter cette souffrance et pour continuer.
Comme Sybil, je vous dirais de vous accrocher aux petites choses de la vie, même les plus petites, même le simple sourire d'une personne pour laquelle vous avez eu une attention.
Nous pensons à vous très fort! Nous souhaitons tellement vous donner la force qui vous est nécessaire.
Cécile
(qui a perdu son garçon)
Pourquoi eux ? Pourquoi nous ? Et si... Mille questions qu'on se pose chaque jour, sans avoir de réponses, sans trouver LE sens...
Ils nous ont devancés, ont franchi le grand passage... Alors je me dis qu'ils connaissent le chemin, et qu'un jour ils nous accueilleront les bras ouverts... Piètre consolation me direz-vous... Mais on fait comme on peut face à ce qui nous reste d'espérance dans ce désastre absolu...
Je vous serre très fort dans mes bras.
Marie-Annick Torrijos-Faisant.
Je ne suis plus la même personne que j'étais. C'est très dur quand arrive la rentrée scolaire, les anniversaires et autres. Ne plus pouvoir faire des choses avec mes enfants, les câlins me manquent tellement ainsi que le son de leurs voix, leurs sourires...
Je me sens brisée mais j'ai la foi et me dis que je les retrouverai quand je partirai. Vivre sans eux, avancer dans la vie, c'est très difficile. Je me donne du courage en imaginant mes enfants à côté de moi et me disant : "Non , maman ne sois pas triste, on se retrouvera un jour". Ils sont tous les jours dans mon coeur et dans mes pensées, ils me manquent tellement. Seules les personnes qui ont vécu la perte d'un enfant, peu importe l'âge, peuvent comprendre et ressentir la souffrance.
Une pensee pour toutes celles qui ont vécu ce drame par accident ou autre.
C'est peut-être cette réalité d'une absence définitive qui me revient comme une claque aujourd'hui, au moment même où les autres autour de moi en parlent moins, où la vie continue comme si de rien n'était... Et moi j'ai mal, j'ai peur qu'on l'oublie, qu'on fasse comme s'il n'avait pas existé alors je m'accroche aux photos, je reconstruis son histoire pour la laisser à sa petite fille quand elle saura lire, pour qu'elle puisse garder l'image de ce visage tendre avec des yeux plein d'amour qu'il posait sur elle.
Je tiens à vous remercier pour vos témoignages car ils m'ont fait comprendre que je ne suis pas seule à traverser ce désert et que le partage est la meilleure chose pour réchauffer un coeur endeuillé. Merci
Accepter, je crois que ce ne sera jamais possible. Il y aura toujours au fond de moi une part de refus. Mais vivre "avec", il le faudra bien. Il faut laisser le temps au temps. Prendre soin de soi, se faire confiance. Aller vers les autres parents endeuillés, trouver des lectures constructives et d'autres plus légères. Oser mettre un pas devant l'autre, des petits pas d'abord, modestement. Accepter sa fragilité.
De tout cœur avec toi.
Amitié
Gaëlle
Une très belle pensée pour toi Valérie.
Nathalie
Je suis sous traitement médical depuis et suivie par des médecins et des coachs, mais rien n'y fait. Quand le jour se lève je suis profondément triste à me demander comment je vais pouvoir faire pour arriver à la fin de la journée pour "dormir" et avoir un petit moment de répit quand les somnifères font leur effet. Je l'appelle souvent au téléphone, lui envoie des messages et partage des liens sur mur Facebook mais toujours sans réponses... J'appréhende le jour de son anniversaire; je ne sais pas comment faire, pourtant il faudrait que je trouve la force et le courage pour ma fille aînée qui n'a que 26 ans.
Est-il possible de pouvoir arriver à surmonter cette douleur insoutenable ?
Mon fils adoré aimait la vie et profitait de chaque instant. Il y a des moments où la douleur est tellement insuportable que j'ai l'impession que je vais devenir folle; et il y a ce sentiment d'injustice qui ne me quitte pas. Ils étaient quatre dans la voiture et lui seul est mort. Pourquoi lui ?
Il débutait tout juste dans sa vie d'adulte, venait de trouver un travail, avait obtenu son diplôme de charcutier traiteur. Il avait touvé un studio depuis cet été. Il était heureux et très amoureux depuis un an de son amie. Et tout s'est arrêté pour lui.
Je ne supporte plus de voir des jeunes marcher sur les trottoirs, rire, fumer ou vivre tout simplement alors que mon Valentin n'est plus. Ma vie s'est arrêtée pour moi aussi et depuis je survis. Je me sens si seule et en décalage avec mon entourage.
J'ai moi aussi perdu ma fille chérie, elle avait 16 ans. Le 15 juillet cela fera trois ans, je n'ai pas arrêté son portable, je lui envoie de sms, j'écoute sa voix sur le répondeur, je n'y arrive pas, j'attends tous les soirs qu'elle rentre à la maison, elle me manque terriblement, comme vous je dois trouver la force pour mon fils plus jeune, je vais au cimetière une fois par semaine, deux fois, j'ai l'impression de m'occuper d'elle, je crève de douleur, j'ai mal, j'ai sa photo face à moi, si belle, si jeune, si généreuse, ça me fait mal de penser qu'elle n'a pas eu le temps de faire sa vie sur terre, elle si heureuse lorsqu'elle y était. Surmonter la douleur, on y arrive, je suis dans l'attente de signes de ma fille, car j'en ai eu parfois, je vous le souhaite aussi.