Annabelle aime Simon qui l’aime en retour. Ensemble, les deux jeunes enfants partagent tout, excepté la maladie. Simon est atteint de leucémie et doit entrer à l’hôpital laissant seule sa précieuse “Annamabelle”. Un jour, Simon meurt et Annabelle reste seule avec son indicible chagrin d’enfant.
Cette histoire poignante – qui suit la trame du dernier roman adulte d’Agnès Ledig, “Dans le murmure des feuilles qui dansent” – évoque frontalement la maladie et la mort avec des mots simples et d’une épatante justesse. Rien d’étonnant quand on connaît un peu Agnès Ledig, cette sage femme devenue romancière après la mort en 2005 de son fils Nathanaël, lui aussi atteint d’une leucémie. De ce vécu personnel, elle a su tirer “Le cimetière des mots doux”, un album illustré pour enfants qui ne minimise rien, ne cache rien du tourbillon d’émotions qui accompagne le deuil, mais le fait avec une infinie sensibilité.
C’est ce qu’elle souhaitait. “Cacher ou taire quelque chose ne le fait pas disparaître, explique-t-elle. Le montrer, le dévoiler tel qu’il existe, par le biais d’une histoire avec douceur et poésie, peut par contre permettre à l’enfant et à l’adulte qui raconte d’expérimenter à distance et sereinement une situation, de se l’approprier du coeur comme on approche sa main de la flamme pour appréhender la notion de chaleur.”
Le texte, destiné à des enfants à partir de cinq ans, est porté par quelques bonheurs d’écriture (“La mélancolie, c’est comme la tristesse, mais avec de la douceur dessus”; “Quand le chagrin est trop fort, il faut le jeter dehors. Les larmes sont là pour ça”) et son propos merveilleusement servi par les illustrations douces, poétiques et colorées de Frédéric Pillot.
Un album illustré à mettre entre toutes les mains, qui offrira aux enfants une aide précieuse pour mettre des mots sur leur tristesse, et aux adultes un sésame pour évoquer avec eux et en douceur des sujets qui ne le sont pas.
Le mot de la fin à Agnès Ledig. “Peut-être que votre enfant va pleurer en écoutant l’histoire, en regardant les images. Ce n’est pas grave. Peut-être que vous allez pleurer en lisant. Ce n’est pas grave non plus. Exprimer une émotion est un premier pas pour la digérer. Et partager cela avec son enfant, c’est partager la vie dans toute sa dimension, ce qui est notre rôle de parent.”
Olivier M.