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Décès de mon petit frère de 21 ans et ode aux frères et sœurs endeuillés

J’ai perdu mon petit frère d’un coma diabétique. Il est mort brutalement, il avait 21 ans.
Mon frère était la personne que j’aimais le plus sur terre. J’avais trois ans la première fois que je l’ai pris dans mes bras, et depuis je ne l’avais jamais lâché.
Notre relation était prise en exemple dans la famille. Souvent on nous pensait en couple quand on allait ensemble faire du shopping ou à des expositions.
Jean-Baptiste (oui je veux continuer à dire son nom) était une très belle personne. Il avait de l’humour, il avait du cœur, il était curieux de tout. Il aimait se cultiver, il aimait transmettre, il aimait les autres. Il était aussi têtu, paresseux, trop sensible et parfois torturé.
[Si tu lis ça mon JB j’espère que tu te marres, non tu n’es pas divinisé et n’y compte pas !]
La douleur de la perte est très grande et la position de sœur endeuillée très difficile à porter.
Mon frère me manque, je pense à lui chaque heure de chaque jour. Il n’est plus là mais l’amour que j’ai pour lui dans mon cœur est intact. Je cherche à me rapprocher de lui dans mon quotidien, je cuisine ses plats préférés, je regarde ses photos, je lui parle dans ma tête…
Le manque n’est pourtant qu’une partie de ma douleur car c’est toute mon identité que je dois reconstruire, mon futur entier qui est remis en question.
J’étais une grande sœur et je ne le suis plus.
J’avais un frère pour m’accompagner dans l’avenir ; jusqu’à l’autel, dans la succession après la mort de nos parents, dans l’éducation de mes futurs enfants. On était supposé vieillir ensemble, partager les responsabilités qu’ont les enfants envers leurs parents ainsi que les moments forts, les moments simples, les moments doux de la vie.
Je pensais que se succéderaient les Noëls, les anniversaires, les Pâques, la naissance de nos enfants, encore des fêtes de famille, et puis les bêtises que nous feraient ces cousins-là, encore des milliers de moments, ses taquineries sur mes cheveux blancs et encore et encore tant de choses. Ce tourbillon naturel m’est refusé, je suis seule désormais.
Nous les frères et sœurs endeuillés nous souffrons mais nous sommes laissés de côté.
Nous devons faire face à la violence et à l’humiliation des gens bien intentionnés qui nous demandent comment vont nos parents et nos grands-parents ; nous devons bien souvent prendre en charge nos parents, noyés dans leur douleur et nous effacer derrière eux.
C’est beaucoup quand la douleur du manque s’ajoute à la peur d’un avenir à reconstruire et à une identité à réinventer.
Nous les frères et sœurs endeuillés, nous aimons nos proches et avons envie de les aider, mais nous avons aussi besoin d’aide.
Merci à l’association de nous permettre de partager notre douleur, et d’apprivoiser l’absence.

Anne-Laure, 25ans,
Sœur de Jean-Baptiste,
Né le 12/11/1996 et décédé le 30/08/2018

7 commentaires

  1. Chère Anne-Laure,
    je réagis à votre message en tant que maman, qui a perdu sa fille le 8 décembre 2018, (suicide), et je voulais vous dire que vous avez tellement raison, le monde extérieur, la société et même l'entourage proche, oublient les frères et soeurs dans leur deuil insurmontable. Depuis cette date qui est une fracture apocalyptique dans mon existence, je pense continuellement à ma fille aînée, au vide incommensurable que laisse la disparition de sa petite soeur adorée, qui devait l'accompagner dans toutes ses expériences d'existence, les plus heureuses comme les plus tragiques (la perte de leurs parents... à laquelle elle devra faire face seule désormais...) Ma fille endeuillée est devenue enfant unique d'un seul coup, elle a perdu ses repères-racines, (des parents heureux ou bien-portant psychologiquement) et son principal repère d'existence : sa petite soeur, qui partageait tout avec elle. Survivre à ce drame, pour elle, pour qu'elle accepte de reprendre goût à la vie, est devenu l'essentiel pour moi, je ne veux pas que mon chagrin maternel immense empêche son potentiel de vie, je ne veux pas faire peser ça sur elle, je masque mon désespoir, mais étrangement, ce n'est pas si difficile, puisque chaque enfant nous porte magistralement par l'Amour qu'on éprouve pour lui, l'Amour est un miracle, la force que cela donne est un miracle. Vous n'êtes pas complètement seule, même si vous êtes seule dans votre tête, comme chacun de nous, vous êtes accompagnée, par votre frère, qui j'en suis certaine veille sur vous, et aussi par toutes les personnes étrangères à votre vie et inconnues, partout sur cette terre, qui subissent la même perte, la même épreuve. C'est un accompagnement fait de silence car on ne lui donne aucune parole, mais tous les deuils sont entourés de puissances vibratoires, qui nous amènent à considérer la vie autrement qu'une brève étape matérielle, tous les deuils sont des secousses sismiques, qui nous font plonger dans le néant ou replonger dans la Vie, celle qui nous est donnée mystérieusement. Notre matérialité existentielle est intimement unie à un Autre monde, qu'on rejoindra tous un jour... Accepter l'expérience de la séparation terrestre est l'expérience ultime. C'est ce qui nous est envoyé, on ne peut pas savoir pourquoi, ce qui est karmique nous échappe, mais on peut en conserver une curiosité pour approfondir la possibilité d'exister. De tout coeur près de vous.
  2. C'est très beau ce que vous écrivez toutes les deux, en souvenir de vos frère et soeur. Une bougie... pour eux

    Comme je comprends votre peine et je partage votre espérance de les savoir ensemble.

    Je vous embrasse,
    Anne-Laure
    Maman de Paul, 22 ans aujourd'hui, qui a perdu en février 2015 son unique petit frère, François qui avait 8 ans
  3. Bonjour Anne-Laure,

    Je viens de lire votre témoignage et il m'a particulièrement touchée parce que j'ai perdu ma fille de 22 ans d'un coma diabétique brutalement comme votre frère.

    J'ai également deux garçons : un plus âgé et un plus jeune qu'elle. Je suis consciente de la douleur qu'ils peuvent éprouver mais c'est très difficile d'en parler avec eux.

    J'aurais aimé discuter avec vous aussi faites-moi signe si vous êtes d'accord.

    Amicalement,
    Patricia
    • Bonjour à vous tous
      Je viens de perdre brutalement mon frère aîné, dû au diabète. Il avait 25ans, j'en ai 24.
      Je suis tellement triste et j'ai tellement mal que je n'arrive même plus à pleurer sa mort ni à parler de lui au temps passé. Mon coeur est avec toute personne qui a perdu un être cher et surtout les frères et soeurs car peu de gens réalisent que nous aussi nous souffrons.
      Hiba, soeur de Haytam décédé le 31 mai 2020 d’une crise de diabète
  4. Bonjour Anne Laure,

    Ta publication me touche énormément car comme toi j’ai perdu ma petite sœur de 21 ans il y a un an et demi maintenant; et tout comme toi je ne voyais pas l’avenir sans elle. Je suis actuellement enceinte et depuis j’appréhende le fait que ma fille ne connaîtra jamais sa tante. On imaginait tellement de choses pour l’avenir qui finalement n’arriveront pas...

    Concernant les parents, comme tu le dis il faut s’effacer pour pouvoir les aider au mieux, toujours rester positif et leur dire que leur douleur est normale mais que la vie continue... Mais au final on aimerait qu’eux aussi nous consolent. Mes parents me disent toujours : "il n’y a pas pire que perdre son enfant, tu ne peux pas comprendre" et pourtant...

    J’ai grandi avec ma sœur, je l’ai épaulée, j’ai ri et fait les quatre cents coups avec elle. Elle était ma personne, ma moitié ce qui rend notre peine aussi légitime que la leur mais dans leur tristesse ils oublient malheureusement tout ça.

    Malgré cela, malgré notre peine et ce vide immense qui ne sera jamais comblé, je pense qu’on doit avancer pour eux qui n’ont pas pu le faire et vivre pour eux même si cela est plus que difficile. Je me dis que si elle me voyait tout le temps pleurer, ce serait terrible pour elle car elle se sentirait coupable et cela m’aide un peu.

    Le plus dur est de passer la culpabilité d’être Celui qui reste... Celui qui doit vivre sans l’autre... Un jour nous les retrouverons.

    Courage à toi.
    Sonia
    • Merci Sonia pour ces mots.

      Je te souhaite du courage, du bonheur et une grossesse aussi apaisée que possible.

      J'allumerai une bougie chez moi en pensant à ta sœur ce soir.

      Bien à toi,
      AL
      • C’est très gentil à toi je ferai de même pour ton frère en espérant qu’ils s’amusent bien tous les deux où qu’ils soient.

        Amicalement,
        Sonia

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