Tristesse et dépression
Tristesse, n’est pas dépression. La dépression marque un échec du deuil. La tristesse en est une étape. Elle signe l’accomplissement du deuil. Elle permet à la fois de progresser vers l’acceptation de la réalité et de se retrouver, de se reconstruire dans son identité propre. L’énergie est tournée vers l’intériorité. Soyez égoïste, ou plutôt égotiste quand vous êtes triste. Préoccupez-vous de vous, de vos besoins. Laissez les autres s’amuser, ne cherchez pas à les suivre, ce n’est pas le moment pour vous. Il y a une étape de repos nécessaire à la reconstruction. Une période de tristesse est un moment de désinvestissement de l’extérieur et d’investissement de soi.
« Je ne peux pas pleurer toute la journée sur mon nombril ! » Il ne s’agit pas de pleurer sur son nombril, mais dans son nombril. Sangloter vraiment dans son ventre, pour se libérer da la souffrance, pour traverser l’épreuve. Trouvez quelqu’un, un ami, pour pleurer dans ses bras. Vous ne serez plus seul, mais entendu dans votre souffrance, vous vous sentirez reconnu et accepté, ce qui aide à ne pas se dévaloriser ou à retourner contre soi ses émotions. Vous sortirez de l’expérience fatigué, et consolé, plutôt que « vidé » (à condition bien sûr de faire vraiment confiance à l’autre et de vous permettre de recevoir ce qu’il vous donne). Et puis, vous pourrez vous autoriser à entrer plus profondément dans l’émotion. Il vous protégera, fournira un cadre dans lequel vous pouvez vous abandonner.
La dépression, rumination morose, se laisse difficilement distraire. On a tendance à choisir des activités qui restent dans une tonalité affective terne. La tristesse, même profonde, accepte d’être éclairée un instant par le rayon lumineux d’un rire.
Isabelle Filliozat
L’Intelligence du cœur,
éditions Jean-Claude Lattès, 1997